Ce qu’il en dit
I HAVE A DREAM
Belle comme il se doit cette phrase célèbre et voilà que ce rêve m’a visité. Tout arrive n’est-ce pas ? Je devais dormir, je dormais peut-être. Incroyable, le Grand Hornu, ce site minier de mon village, le bagne en ce temps de mon enfance, était transformé, oui, en mémoire du vieux et toujours frais SOCIALISME. « Vive la Sociale », James Ensor. Ces vieilles salles vides étaient couvertes de documents de toute « nature », sur Jaurès, la Charte, le Fusil brisé, Marx, Defuisseaux et beaucoup d’autres, le mayeur Quinchon qui me pinçait les oreilles et tant d’autres encore. Bien sûr Léon Frédéric revenu d’Orsay et James Ensor de Malibu. « Vive la Sociale », nom de dieux. Et ce vieux bagne de mon enfance était devenu notre MÉMOIRE pour demain et déjà aujourd’hui. Pourtant je me suis senti si vieux, chers camarades, mais … I have a dream… Et les salles sont vides Peut-on encore rêver…
SILICOSE VALLEY OU LES 30 DENIERS
Q : Dans le Borinage, que tu orthographies souvent Boricage, on voit Anvers, l’Escaut et Antwerpen. Pourquoi ces deux images sinon permanentes du moins fréquentes ?
R : Oui, ces images tenaces, et Anvers, cette ville, pour moi la Ville, le fleuve, les musées, les moules, les putes, l’exotisme, des Ailleurs, un ailleurs familier avec des parfums de partance et puis … Anvers, c’est mon secret de Polichinelle.
Mais surtout pas de folklore, surtout pas de folklore.
En prime, permets-moi de te dire que « la peinture est un art optique » (M. Duchamp) et je dirais aussi « merveilleux » , importantes ces deux « mises au point ». Pour ta question sur le Borinage, ses silhouettes sont bien tentantes pour qui vient de là. Tout a changé, les terrils de mamelles noires sont devenus purées vertes et les balafres du confort des fesses ont tout foutu en l’air dans ce paysage oublié.
Q : Il y a un goût d’incomplet et que tu ne dis pas. Tu aimes le théâtre ; pourquoi d’inutiles coulisses ?
R : Des coulisses ! Plutôt la fosse d’orchestre. Mes peintures sont faites de formes et de couleurs, nous disons de « pictural » et avec cela des images les suscitent et les recouvrent, mais n’oublie pas – un art plastique et merveilleux, la Peinture.
Q : Souvent la Silicose Valley…
R : Ah ! Ne m’en parle pas. Le Borinage, une cité-dortoir au chômage radical. La Silicose Valley vendue pour 30 deniers. Vois-tu, je suis un banlieusard d’Aubervilliers dans le neuf-trois, provisoirement au Boricage et Gardarem lou Borinage. Mais, peinture d’abord.
Et puisque tu ne demandes rien sur mon métier de peintre, d’Altamira à Jeff Koons je regarde tout. Irais-tu demander à un gynéco ce qu’il pense de l’amour ou à un Trappiste s’il boit du coca. Tu demandes ce que j’aime ? Ce gros mot … mais la peinture voyons et si ça ne se voit pas, alors c’est loupé. Les curateurs, un drogué ne parle pas des dealers.
Silicose Valley est la rencontre de souvenirs intimes et d’une terre et d’hommes massacrés, mes amis. Ici est, sont les thèmes, les plongeoirs, des oriflammes. …
Q : Qu’a à voir la peinture dans tout ça ?
R: Cela ne te regarde pas, demande à Silicose Valley, mon pays désolé, vendu, trahi, et la réponse sera tienne. Savoir, voir, savoir voir.
Il y aurait tant à dire de la peinture. On cause, on cause !
Surtout, surtout, je suis peintre. Et pas de folklore. Comme dit la Bible, « ce qu’on ajoute vient du Malin ».
Et la Silicose Valley et Silicon Valley, elle est partout, à Francfort, dans la City, au Luxembourg.
Et moi, je suis d’ici et d’ailleurs. Regarde. En compagnon certes, mais pas plus, hélas.
N’oublie jamais Pandora.
Q : Pour qui peignez-vous ?
R : Pour moi, quelques amateurs, les aveugles, les martinets. Peindre, voyez-vous, c’est « parler chinois dans sa propre langue » (J.L.)
Le printemps sera précoce cette année. Profitons-en.
Que dirais-je donc, sinon ceci, en bref : Cézanne ne peignait pas ses pommes car il aimait la compote mais la Peinture.
Je peins ce que vous voyez, sans souci folklorique.
Aussi tel peintre aimait les pommes bien rondes et joufflues, Renoir aussi, Permeke le lion de Waterloo et De Kooning les bonnes.